Kreiz-Breizh war Velo : Roudour remet ça pour la troisième fois. Le Télégramme. 06/08/2020
Apprendre le breton en pédalant ! C’est la formule testée et approuvée depuis trois ans par Roudour sur les routes du centre Bretagne.
Apprendre le breton tout en découvrant le centre Bretagne à vélo, la formule pouvait paraître surprenante il y a encore trois ans. Initiée par Roudour, l’organisme de formation à l’apprentissage de la langue bretonne, elle a pourtant fait ses preuves puisque cette semaine, treize stagiaires sillonnent le Kreiz-Breizh war marc’h houarn (à vélo) à la découverte ou la redécouverte du Breton.
Lundi 3 août, pour le début de la formation, les premiers coups de pédales les ont menés à la vallée de l’Hyère où nous les avons rencontrés à l’heure du pique-nique.
Rencontrer des locuteurs
bretonnants
« C’est une bonne année », se réjouit d’emblée Monna, enseignant à Roudour. « Nous sommes parvenus à adapter la formule aux protocoles sanitaires. Comme nous sommes essentiellement dehors, c’est plus simple ». Les stagiaires se sont rencontrés ce matin et l’osmose semble déjà se faire. Ils sont 13 venus cette année, répartis en deux groupes de niveau. « Aujourd’hui, nous allons rester sur Carhaix et découvrir la vallée de l’Hyères. Chaque jour de la semaine le groupe mettra ensuite le cap à vélo sur différentes destinations du Kreiz-Breizh afin de visiter et rencontrer des locuteurs bretonnants qui leur parleront d’histoire, de culture, ou des particularités des lieus visités, en breton. « Mardi, nous pousseront jusqu’à Locmaria-Berrien puis Huelgoat, mercredi destination Saint-Hernin. Jeudi nous partirons de Brasparts pour faire le tour du lac de Brennilis, en passant par Botmeur, La Feuillée, où nous visiterons la fabrique de limonade « Dour an doueez ». Enfin pour la dernière journée, le groupe partira à l’assaut de Paule et de ses environs en passant par le canal.
« Je lis beaucoup mais ce n’est pas suffisant. Il faut parler avant tout ».
« Parler couramment le breton
avant de mourir »
Venus d’un peu toute la Bretagne, les stagiaires sont animés par différentes motivations, même si le breton est au cœur de leur quête. Certains comme Alan ou Marie ont participé aux précédentes éditions, pour d’autres, c’est une grande première.
Venu tout droit du pays vannetais Ehouarn, est à la retraite depuis seulement un mois ! S’il a acquis au fil des années un bon niveau de breton, il souhaite dorénavant se perfectionner afin de « parler couramment le breton avant de mourir !… Faire du vélo et visiter la Bretagne tout en parlant avec d’autres locuteurs, c’est vraiment chouette. Je lis beaucoup mais ce n’est pas suffisant. Il faut parler avant tout. Rester en immersion pendant plusieurs jours permet de progresser. Je suis fatigué de parler français en Bretagne. À la rentrée, il entamera un stage de six mois en immersion avec… Stumdi à Vannes, formation également proposée par Roudour.
« J’avais oublié cette langue. Ça me plaît beaucoup de parler et de chanter en breton ».
De son côté, Nicole vient de Guérande. Elle est née à Landeleau et a appris le français à l’école car la langue parlée à la maison était le breton. Ensuite, elle l’a oublié pendant des années « parce que le breton a été mis de côté à une époque ». Mais lorsqu’il y a une quinzaine d’années, sa petite-fille est passée par l’école Diwan, Nicole s’est remise à parler avec elle. « J’avais oublié cette langue. Ça me plaît beaucoup de parler et de chanter en breton ».
D’autres parmi les stagiaires ont commencé leur apprentissage depuis peu. Comme Sarah, une Anglaise vivant à Huelgoat. Originaire de la région des lacs, au nord ouest de l’Angleterre, elle a vécu un moment dans le Gard. « Je vis en centre Bretagne depuis trois ans et cette région m’a donné envie d’apprendre la langue ». Il y a deux mois seulement, elle a débuté avec un livre. « Ce n’est pas facile d’apprendre toute seule. Grâce à ce stage, je pense que je vais pouvoir parler enfin avec des gens.
Philippe vient quant à lui de Rennes. Briochin de naissance, il n’a jamais parlé le breton à part au lycée il y a une quarantaine d’années ! « Je sais que je ne parlerais jamais un bon breton, mais j’aimerais bien le comprendre un peu. C’est compliqué aujourd’hui de trouver des locuteurs dont c’est la langue maternelle, surtout sur Rennes ».
Pendant qu’il suit ce stage, sa femme elle suit un stage… d’anglais en immersion complète ! Le vélo ? pour le moment ça va il n’y a eu que de la descente, mais ça va commencer à être dur ! », s’amuse-t-il.
Quelles que soient leurs origines, leur âge, leur niveau social ou leur maîtrise de la langue, ces 13 là sont partis pour revenir l’an prochain. Le concept proposé par Roudour d’apprendre le breton à vélo a bien pris. Si vous les croisez sur la route, faites leur un petit signe afin de les encourager, à franchir les monts d’Arrée certes, mais aussi et peut-être surtout à faire que la langue bretonne continue à vivre dans la bouche des Bretons de sang ou de cœur.